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FILMS / CRITIQUES Portugal

Critique : Um Corpo que Dança - Ballet Gulbenkian 1965-2005

par 

- Marco Martins brosse un tableau cinématographique habile et séduisant de l’histoire du Gulbenkian Ballet, ainsi que de l’ambiance socio-politique au Portugal sur la période 1965-2005

Critique : Um Corpo que Dança - Ballet Gulbenkian 1965-2005

Un corps dansant, un corps sociopolitique et un corps cinématographique : telles sont les forces à l'oeuvre dans le nouveau film de Marco Martins, Um Corpo que Dança - Ballet Gulbenkian 1965-2005, à présent sur les écrans au Portugal, distribué par Vende-se Filmes. Le titre pourrait laisser penser que ce documentaire se contente de retracer l’histoire du Gulbenkian Ballet, une compagnie de danse fondée par la Fondation Calouste-Gulbenkian. Cependant, dans la mesure où les arts peuvent être le reflet de la société, voire même anticiper ce qui est (ou devrait être) encore à venir, le film offre aussi un aperçu de ces éléments indéniablement indissociables.

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Um Corpo que Dança s’appuie sur des recherches à partir d’images d’archives, associées à des passages actuels et des entretiens audio réalisés avec les danseurs, les chorégraphes et les autres personnes qui ont fait partie de l’histoire de la compagnie de danse.

Le film, divisé en 12 chapitres, s'ouvre sur un prologue qui donne quelques indices sur ce à quoi on peut s’attendre : premièrement, on entend Merce Cunningham parler de la différence entre la scène et la caméra pour ce qui est de la représentation des spectacles de danse. Ce sont deux médiums qui présentent au public des perspectives différentes, donnant le ton pour le type de compréhension que l’on peut tirer des images d’archives des spectacles du Gulbenkian Ballet. Ensuite, des images de la révolution de 1974 apparaissent, suivies par un cours de danse dans une usine de peinture en 1975, où les danseurs expliquent pourquoi répéter et pratiquer les techniques les plus élémentaires pendant des années est essentiel pour pouvoir se produire sur scène. On les confronte à la question suivante : la danse classique est-elle faite pour le peuple ? Comment se rattachait-elle à des principes plus révolutionnaires ? La réponse était très claire à l'époque : être dans cette usine était, en soi, un acte révolutionnaire.

Au fil des 12 chapitres suivants (principalement proposés dans un ordre linéaire et chronologique), on assiste à une histoire qui débute à l'époque de la dictature (quand l'analphabétisme et la pauvreté étaient choses courantes), après quoi vient la révolution puis le temps de la démocratie (à ce moment-là, par exemple, les études artistiques ont été démocratisées), jusqu’en 2005. Au cours de ces années-là, le Gulbenkian Ballet a eu six directeurs artistiques différents, notamment Jorge Salavisa, qui y a passé près de 20 ans et à qui le film est dédié. Une des grandes idées développées ici est le concept d’identité. Le plus gros de ce que l’on voit dans ce film se rapporte en effet à la tentative du Gulbenkian Ballet de définir sa propre identité – à un moment où le Portugal lui-même tâchait collectivement de (re)définir ce qui constituait son identité nationale. Parallèlement à cela, on voit aussi une autre identité s'épanouir : celle du film. Quoique le film illustre une approche assez traditionnelle du documentaire, il parvient en même temps à la chambouler légèrement, subtilement.

On sent que la connexion entre tant de morceaux d’histoire aurait pu ne pas bien fonctionner, mais c’est exactement en cela que le film est très juste : grâce son montage impressionnant, ce film de deux heures qui parcourt quatre décennies de récits et d’Histoire se laisse étonnamment bien regarder. L'utilisation brillante qu'il fait des images d’archives lui donne une esthétique sublime, complétée par un excellent mixage son, qui transforme le film en une expérience sensorielle dans l’ensemble extrêmement agréable. La musique du film est parfois trop présente, mais cela n'empêche pas que le film constitue un accomplissement impressionnant. Aussi fluide qu’accessible à tout type de public, Um Corpo que Dançafait passer très clairement un message capital du passé adressé au présent, et envisage le futur pour déterminer combien les arts ont été, et sont toujours, un élément clef de la société et suggérer que nous autres (en tant qu'individus, que société et que corps en mouvement qui se tranforment tout le temps) avons besoin qu'ils progressent, évoluent et existent.

Um Corpo que Dança, né d'une initiative de la Fondation Calouste Gulbenkian, a été coproduit par Vende-se Filmes et RTP.

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(Traduit de l'anglais par Marine Régnier)

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