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BLACK NIGHTS 2021 Compétition

Critique : Entre la niebla

par 

- Ce film d’Augusto Sandino ajoute au réalisme magique des éléments de drame psychologique, avec en toile de fond un désastre écologique imminent

Critique : Entre la niebla
Sebastian Pii dans Entre la niebla

Le réalisateur colombien Augusto Sandino est de retour au Festival Black Nights de Tallinn après y avoir remporté le Prix spécial du jury et le Prix FIPRESCI en 2016 avec son premier long-métrage, Gentle Breath. Entre la niebla [+lire aussi :
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, sélectionné en compétition, est un travail extrêmement énigmatique qui mélange réalisme magique et drame psychologique.

Le film de Sandino ne suit pas un film narratif à proprement parler. Au lieu de cela, il tâche de proposer au spectateur une expérience cinématographique, qui plus est assez singulière, qui pourrait diviser le public par sa nature particulièrement fragmentaire, et le "brouillard" qui l'enveloppe, pourrait-on dire pour faire allusion au titre. Le personnage qu'on observe ici est un berger solitaire qui s’appelle tout simplement "F" (incarné par le photographe Sebastian Pii, qui est atteint du syndrome d'Hallermann–Streiff) et qui fait office de gardien d'une zone montagneuse très isolée, le paramo de Sumapaz. Dès le départ, on se rend compte que l'écosystème dans lequel il vit est en danger, car il est en train d’être détruit violemment par l’intervention humaine. Par ailleurs, F doit aussi s’occuper de son père (Mario de Jesús Viana), qui est souffrant.

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Dans l’ensemble, le potentiel de Entre la niebla repose fortement sur la présence magnétique et puissante de son acteur principal. Les traits atypiques de l’acteur (son corps, sa voix et ses mouvements) deviennent une toile sur laquelle Sandino parvient à peindre un personnage fictionnel unique. La confiance mutuelle que Sandino et Pii se sont faite dans ce processus créatif est très manifeste à l’écran et leur permet à tous les deux d’explorer (intimement et en profondeur) certains aspects délicats de la vie, comme la solitude, l’instinct, la peur, ainsi que (et c'est le plus important) l'eros. À ce niveau-là, Sandino fait du très bon travail et s'appuie sur la sensibilité et les autres qualités de Pii. Dans ce sens, la manière dont il opère avec son acteur peut être comparée à ce qu'a fait Matteo Garrone avec Marcello Fonte dans Dogman [+lire aussi :
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, ou Jo Sol avec Íñigo Martínez dans Armugan [+lire aussi :
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Les pulsions sexuelles de F vont occuper de plus en plus d'espace et donnent lieu à des scènes visuellement très intéressantes, notamment une où le héros mime un cunnilingus en léchant l’intérieur d’une fraise.

En dehors de certains effets en images de synthèse pas franchement convaincants (comme l'escalier blanc menant au ciel qui apparaît dans une des visions de F), réalité et imagination se marient très bien, en particulier grâce au travail attentif de Gio Park à la caméra. Le directeur de la photographie permet à cet environnement naturel hostile et au brouillard d'affecter l’atmosphère du film, mystérieuse et inconfortable. Il opte pour une palette sombre, dominée par les tons de gris, pour les extérieurs, et pour des couleurs plus chaudes et rassurantes pour les intérieurs.

Plus avant dans le film, ses composantes surréalistes et imaginaires prennent le pas sur le reste, car F rêve de s'enfuir de cette terre veines et apprend, apparemment, l'anglais, la langue des "astronautes" et des "voyageurs". Malgré le fait que l’histoire se passe dans les Andes, on ne trouve ici pas trace de la langue espagnole, sauf dans deux chansons qui font partie de la bande originale. On note que Sandino a choisi de limiter autant que possible les dialogues, et les rares phrases qu'on entend sont en anglais ou dans le dialecte (fictionnel) de Sunapakún, ce qui contribue à immerger le spectateur dans un parcours lyrique (qui n’en reste pas moins assez aliénant) dans un non-lieu, à un moment non spécifié, sans doute proche de nos jours (quelques objets modernes apparaissent, comme des radios et des voitures).

Entre la niebla a été produit par MagicLab (République tchèque), Perspektiv Produksjon (Norvège) et Schweizen Media Group (Colombie). Les ventes internationales du film sont gérées par la société berlinoise Pluto Film.

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(Traduit de l'anglais)

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