email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

LECCE 2021

Critique : Only Human

par 

- Le troisième long-métrage du Macédonien Igor Ivanov enchevêtre six histoires de déchéance morale, dans un crescendo dramatique bien orchestré et bien interprété

Critique : Only Human
Sergej Dimovski dans Only Human

Homo faber, homo ludens, homo ridens... : voici certaines des catégories d'êtres humains dépeintes dans le troisième long-métrage du réalisateur macédonien Igor Ivanov, Only Human [+lire aussi :
bande-annonce
interview : Igor Ivanov
fiche film
]
, Prix Cineuropa au Festival du cinéma européen de Lecce, sorte de traité anthropologique en images qui enchevêtre six histoires centrées sur autant de personnages archétypiques (on a aussi l’homo adorans, l'homo economicus et l'homo amans), ici rapprochés par une décadence morale rampante, avec pour toile de fond le Skopje d’aujourd’hui, et plus généralement une Macédoine du Nord sous l'emprise croissante du chômage et de la corruption.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

Le problème du travail qui manque est au centre du premier segment, dont le personnage central est un jeune homme (Sergej Dimovski) qui se présente une ennième fois au bureau des chercheurs d’emploi pour s’entendre proposer, à lui qui est diplômé en philosophie, un travail très peu adapté à ses compétences mais cette fois, ayant déjà refusé quatre propositions, il est obligé de l’accepter : il va devoir être fossoyeur. C'est sans doute le pire travail du monde, mais il va lui valoir un coup de chance inimaginable. À la fin de ce segment apparaît un prêtre (Igor Angelov), qui sera le sujet du segment suivant, dans une sorte de logique de passage de témoin, d’un épisode à l’autre, qui va se répéter selon des modalités similaires par la suite.

Ce deuxième épisode met en scène l’avidité d'une certaine Église, qui profite des veuves inconsolables et riches pour s’approprier leurs biens – mais même une veuve qui a fait le choix de l’ascétisme peur parfois réserver de mauvaises surprises. Jusque-là, le ton général du film est celui de la comédie et de la satire sociale, et le récit avance à grands coups de cynisme et de paradoxes. À partir du troisième épisode, le drame et la brutalité vont croissant, et seront poussés à leurs extrêmes. Ça commence avec l’histoire d’une jeune femme (Maylinda Kosumovic) accro aux jeux de hasard qui finit par détruire jusqu’à la vie de son mari (Sashko Kocev), suivie de celle d'un comique de scène dépressif (Sashko Kocev) qui, pendant un numéro, ne trouve rien de mieux à faire que d’attaquer une des figures les plus corrompues et puissantes du pays, ce qu’il va payer très cher. On en arrive à l’histoire d’une jeune prostituée (Natasha Petrovik), mère d’une fillette que les services sociaux menacent d’emmener et qui ne réussit même plus à vendre son corps du fait de l'appauvrissement des gens. Le dernier personnage est un jeune homme affecté du syndrome de Down (Aleksandar Matovski) qui devrait en théorie être un riche héritier, mais qui, n’ayant jamais été reconnu par son père, se trouve contraint d’affronter la vie avec ses propres moyens, limités.

Tout fonctionne dans Only Human : le scénario (écrit par le réalisateur avec Sasho Kokalanov) est solide et les transitions d'un épisode à l’autre sont fluides et bien agencées, ainsi que l’utilisation de personnages récurrents (l’avocat incarné par Jordan Simonov, par exemple, qui donne une sorte d'unité à l’ensemble). La troupe des comédiens elle-même est remarquable (mention spéciale pour Oliver Mitkovski et Natasha Petrovik) et le film, savamment tourné, propose des visuels captivants. Le tout est mis au service d’une réflexion importante sur la déshumanisation des temps modernes. "Chacun de ces personnages gravite vers l’archétype dans lequel il s’inscrit, mais tous perdent, dans leur conflit avec la société, leurs valeurs éthiques et remettent en cause les bases de l’humanisme", explique le réalisateur.

Only Human a été produit par la société macédonienne Skopje Film Studio en coproduction avec Art & Popcorn (Serbie), Gala Film (Bulgarie) et Iridium Film (Slovénie). Les ventes internationales du film sont assurées par l'enseigne serbe Soul Food.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

(Traduit de l'italien)

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Privacy Policy