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VENISE 2021 Orizzonti

Critique : White Building

par 

- VENISE 2021 : Dans ce scintillant premier long-métrage de fiction par le réalisateur cambodgien Kavich Neang, on dit au revoir au bâtiment blanc du titre, à Phnom Penh

Critique : White Building

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, du réalisateur cambodgien Kavich Neang, répète un sage conseil, pour le cas où les choses se compliqueraient : si besoin, il faut danser. Le film s'ouvre sur une scène où le personnage principal, Samnang, ou Nang (Piseth Chhun), et ses deux copains répètent une chorégraphie de hip-hop synchronisée pour une compétition, et ne sont pas mauvais du tout. Cela permet de contrebalancer les ténèbres (ténèbres magnifiquement colorées et éclairées, il faut le souligner) qui finissent par consumer cet impressionnant premier long-métrage de fiction. Celui-ci est à associer à un travail précédent du réalisateur, le documentaire Last Night I Saw You Smiling [+lire aussi :
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, qui parlait également de la vente du logement social de sa famille et de la gentrification en cours là-bas, de manière plus générale. Le film a fait sa première en début de semaine dans la section Orizzonti de la Mostra de Venise, et il jouera au Festival BFI de Londres, dans la compétition Premiers films, le mois prochain.

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White Building, un travail profondément personnel, et qui change constamment de forme, suit les mésaventures de Nang et ses mélancoliques parents, sa mère (Sokha Uk) et son père (Sithan Hout), en même temps que celles du "bâtiment blanc" du titre, qui a été leur foyer depuis des générations et qui est un bâtiment social très apprécié des gens à Phnom-Penh, mais qui a été mis sur le marché pour des investisseurs japonais et chinois. Nous sommes transitoires, et nous restons rarement en place, oui, mais le "White Building" a une certaine fonction symbolique : il accueille une classe très vibrante d'artistes et de fonctionnaires, et depuis sa construction en 1963 (dans un style moderniste très particulier qui correspond à l’essor de l’architecture brutaliste au Royaume-Uni), il a été le témoin silencieux des tragiques soulèvements sociaux au Cambodge.

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d'Andrea Arnold, qui remonte à 2009, la réalisatrice avait créé un précédent intéressant pour filmer cette imagerie typique du réalisme social britannique (les cités ouvrières, le béton et les cuisines minuscules) dans un style plus abstrait et lyrique. Ce n’est pas éloigné de ce que Neang arrive à faire ici, jusqu’au motif important de la danse (ici exprimé par des danseurs experts, pas des gens qui se balancent dans un coin de discothèque) comme manière de se purger et se libérer de la douleur. Après que les trois amis, Nang, Ah Kha et Tol, aient mesuré les limites de leurs talents de haut niveau lors d'une performance publique décevante (et qu’il est triste de voir leurs rêves s'écrouler !), l'attention se détourne vers la fuite des parents du bâtiment, un fil rouge encore plus pessimiste du film.

Ceci est emblématisé par le diabète du papa de Nang (un personnage qui reste sans nom), qui cause un problème d’orteil non-irrigué que le médecin représentant le système de santé local, tourné vers le profit, suggère d'amputer. Le père est déterminé, et préfère les remèdes naturels, comme une mixture de miel ; ironiquement, il semble être un individu moins pragmatique que son fils d'à peine une vingtaine d'années, qui voit comme le Cambodge est en train de décliner et partage la détermination de sa génération à faire quelque chose, à agir. Et donc comme le réalisateur du film, Nang entreprend de devenir cinéaste.

Il y a des fois où la durée de White Building (exactement 90 minutes) semble plus une obligation que quelque chose de justifié par le nombre réduit d’événements importants qui se déploient ici. Neang aussi tente des choses : les interludes de type documentaire, faits de longs plans fixes sur les couloirs délabrés, puis une séquence fantasmée minimaliste proche du cinéma d'Apichatpong Weerasethakul (source d’inspiration avouée du réalisateur), sont des expérimentations qui font parfois plus l'effet d’être inégales et provisoires que magistrales. Mais pour une coproduction cambodgienne aussi peu caractéristique, ce film suggère que Neang pourrait, à terme, devenir un bon conteur d'histoires locales, un poète de vies happées par l’Histoire, comme l'est son coproducteur Jia Zhangke pour la Chine.

White Building, qui a réuni le Cambodge, la France, la Chine et le Qatar, a été produit par Davy Chou pour Anti-Archive et Marine Arrighi de Casanova pour Apsara Films. Les ventes internationales du film sont assurées par Les Films du Losange.

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(Traduit de l'anglais)

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