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VENISE 2021 Compétition

Critique : Illusions perdues

par 

- VENISE 2021 : Xavier Giannoli fait du somptueux tableau balzacien un parcours haut en couleurs du Paris des splendides années 1820

Critique : Illusions perdues
Benjamin Voisin dans Illusions perdues

Illusions perdues [+lire aussi :
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, en compétition à la 78e Mostra de Venise, marque le retour de Xavier Giannoli sur le Lido après Marguerite [+lire aussi :
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, en 2015. Comme les années 1920 dans cet autre film, les décors d'un Paris d'époque sont pleinement exploités dans le nouveau, dont l'action se situe un siècle plus tôt, pendant les prospères années 1820 de la Restauration, parfois décrite comme une des périodes les plus heureuses de l'Histoire de France.

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Une oeuvre considérable en particulier a raconté cette époque : La Comédie humaine d'Honoré de Balzac (1829-48), où les Illusions perdues occupent une place centrale. Le texte chronique les fortunes et infortunes d'un jeune romantique ; l'écriture elle-même s'ancre fermement dans l'école réaliste, faisant écho au Barry Lyndon de Thackeray, paru à la même époque et lui aussi consacré au destin d'un "blanc-bec d'humble extraction qui désire ardemment accéder à la haute société".

Ceci décrit bien Lucien, dont le patronyme est Chardon, mais qui adopte le nom de Rubempré hérité de sa mère, qui vient d'une famille aristocratique désargentée. Le jeune homme, beau et fougueux, intrigue les salons facilement impressionnables de sa ville de province, Angoulême, en partie pour sa poésie mais avant tout pour sa belle allure, qui fait vibrer Madame de Bargeton, la mécène locale. Ils partent ensemble à Paris, où Lucien espère gravir tous les échelons. Hélas, le blues du provincial devient le blues de la grande ville, car le voilà qui se retrouve sans le sou et abandonné par sa riche maîtresse – à laquelle des gens bien avisés ont conseillé d'éviter toute diffamation. Lucien a cependant l'occasion de se faire une place dans le secteur en pleine explosion de la presse à scandales, ce qui lui remplit les poches mais entache ses anciennes vélléités de noblesse de caractère (la saga assez tragique de Lucien est vaste, et le film reprend principalement le deuxième volume de la trilogie de récits qui constitue les Illusions perdues : Un grand homme de province à Paris).

Dans la mesure où les adaptations historiques sont toujours plus ou moins des signes de leur temps, Illusions perdues version 2021 (une mini-série sur le roman a déjà été réalisée en 1966) s'en donne à coeur joie sur le "big business" des "fake news" et l'aise avec laquelle n'importe quoi peut être acheté ou vendu. La grande différence entre l'époque et nos jours est l'éloquence avec laquelle ces marchands de prose, qui pouvaient faire ou défaire les réputations, composaient leurs articles (à l'instar du grand manipulateur Singali, qui peut obtenir au théâtre des applaudissements nourris ou des sifflets, selon la personne qui paie), une éloquence qui dépasse largement les productions des influenceurs d'aujourd'hui, quel que soit leur nombre de "followers".

Livrant une adaptation toute aussi somptueuse du matériel à sa disposition, Giannoli remplit cette belle toile de vie, de couleurs et de doses généreuses de paganisme épicurien. Une partie du régal vient aussi de la troupe, menée par un Benjamin Voisin bien entouré par Cécile de France, Vincent Lacoste, Jeanne Balibar, Salomé Dewaels et André Marcon pour incarner la bande de canailles, de personnages bien nés, d'écrivaillons et de gourgandines qui entrent et sortent de la vie de Lucien. Gérard Depardieu est là aussi dans le rôle d'un éditeur analphabète à qui on ne la fait pas, et Xavier Dolan dans celui du grand rival d'écriture de notre héros, Nathan, qui nous narre sèchement cette histoire, non sans évoquer à la fois Barry Lyndon et Les Affranchis.

Illusions perdues a été produit par Curiosa Films, Gaumont, France 3 Cinéma, Canal+ et Ciné+, en coproduction avec Umedia, via uFund. Les ventes internationales du film sont gérées par Gaumont.

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(Traduit de l'anglais)

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