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VENISE 2021 Giornate degli Autori

Critique : Caveman – Il gigante nascosto

par 

- VENISE 2021 : Tommaso Landucci rend hommage à un homme qui a transformé son art, délicat et courageux, en un véritable testament

Critique : Caveman – Il gigante nascosto

Après avoir été assistant réalisateur pour des metteurs en scène du calibre de Luca Guadagnino et Claudio Giovannesi, Tommaso Landucci présente en première mondiale à Venise, aux Giornate degli Autori, son premier long-métrage, le surprenant Caveman – Il gigante nascosto [+lire aussi :
bande-annonce
interview : Tommaso Landucci
fiche film
]
. Ce film retrace les dernières années de la vie du sculpteur italien Filippo Dobrilla en enquêtant sur son intimité et dévoile, sans jamais brûler les étapes d’une relation artistique qui s’est transformée en une amitié profonde, ce qui alimente vraiment sa créativité insatiable, mais toujours discrète.

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Caveman se nourrit à la fois du regard méticuleux et sincère de Landucci et de la force tranquille et mystérieuse de Dobrilla, une fusion parfaite qui donne vie à un film qui touche en profondeur. Le film, baigné d'une lumière qui évoque Le Caravage (photographiée par Francesca Zonars, assistée de Tullio Bernabei pour les scènes spéléologiques), fouille dans les méandres de l’esprit du sculpteur et spéléologue italien de manière aussi métaphorique que concrète. C’est en effet dans les entrailles de la terre, à 650 mètres de profondeur, que gît le chef-d’œuvre de Dobrilla, un nu géant et endormi qui se cache du regard de tous, comme son créateur. Un plaisir "coupable" dont le sculpteur a joui en secret, avec celui qui semble avoir été son plus grand amour de jeunesse.

Dobrilla, comme beaucoup d’hommes nés dans une société encore fortement patriarcale et hétéronormative, joue le jeu pervers de la "normalité", néanmoins sans jamais cacher tout à fait sa vraie nature : introvertie, introspective et libre de toute catégorisation, qu'elle soit liée au genre, aux orientations sexuelles, sociale ou autre. Conscient des difficultés liées à sa position de "chômeur de l'art qui ne cessera jamais de sculpter", pour reprendre ses mots, le héros du film se retrouve quoiqu'il en soit obligé de faire le point, devenant malgré lui complice d'un monde de l'art peu ouvert à la sincérité, à la fragilité et à la différence. Sa rencontre avec l’influent critique d'art italien Vittorio Sgarbi (qui l'a découvert et lancé dans le monde de l'art à la fin des années 1990), entouré d'une foule d'assistants et valets aux allures d'éphèbes, est, dans ce sens, emblématique. La grotte dans laquelle est couché son géant lui sert alors de refuge mais aussi de caisse de résonance d'un monde intérieur fait de contradictions et de beaucoup de zones d’ombre. Insaisissable, solitaire et courageux, Dobrilla échappe à toutes les classifications. C'est un homme mystique, presque naïf, grand admirateur de l'orfèvre et sculpteur Benvenuto Cellini,  mais c'est aussi quelqu'un d'irascible et violent, pourtant capable de créer des objets d'un incroyable raffinement. Une complexité et une ambiguïté qui ne cessent de traverser le film de Landucci, nous offrant le portrait sincère d’un artiste et d'un homme exceptionnel dont le mystère ne sera jamais vraiment révélé, gardé et alimenté comme il est, pour toujours, par un imposant et tranquille géant solitaire que gît dans les entrailles de la terre. Insatiable créateur de personnages de marbre, de craie et de bronze (souvent inspirés de son propre corps en mouvement) qui ne doivent rendre de compte à personne, Dobrilla n’a jamais cessé de chercher sa place dans une société souvent trop bruyante, parfois hostile, indéniablement peu inclusive.

Après avoir passé plus de quatre ans à suivre les aventures des sculptures, jusqu’à la tragique disparition de l'artiste, c'est l’anarchiste discret mais pleinement conscient de ses choix que Landucci fait affleurer à la surface de son film : un artiste et un être humain en lutte non seulement avec les règles que la société lui impose, mais aussi et surtout en dialogue permanent avec les profondes contradictions qui lui étaient propres.

Caveman – Il gigante nascosto a été produit par la société romaine DocLab et la zurichoise Contrast Film, en coproduction avec la RSI Radiotelevisione svizzera. Les ventes internationales du film sont gérées par Deckert Distribution.

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(Traduit de l'italien)

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