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VENISE 2021 Orizzonti

Critique : True Things

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- VENISE 2021: C’est une histoire d’amour compliquée qui s’épanouit dans le nouveau film de Harry Wootliff, et elle est bien portée par les prestations sublimes de Ruth Wilson et Tom Burke

Critique : True Things

Si son visage sombre apparaît dans les suggestions de votre application de rencontre, ou si, de manière assez désinvolte, il vous invite en public, assurez-vous de tenir Tom Burke à bonne distance. La cinéaste Harry Wootliff, valeur montante du cinéma britannique, a réalisé un coup de maître en lui confiant, dans son deuxième long-métrage True Things [+lire aussi :
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, le rôle d’un de ces fumiers imprévisibles et apparemment irrésistibles. Il avait auparavant interprété des rôles comme celui de l’amant toxico dans The Souvenir [+lire aussi :
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, mais aussi, excusez du peu, celui d’Orson Welles dans Mank. Il incarne une présence quasi fantomatique autour de Kate (Ruth Wilson) qu’il rebute et fascine tour à tour. Il est ici question d’une relation plus profonde que la plupart, une relation honnête et sincère dans le récit qu’elle fait de ce que certains balaieraient de la main comme "des problèmes de riches". Le film a été présenté en avant-première dans la section Orrizonti de la Mostra, le premier samedi de l’édition du festival cette année.

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Kate est agent à Pôle emploi. Cette profession, qu’elle a choisie à contrecœur, l’oblige, comme l’a écrit T.S. Eliot, à "se préparer un visage à la rencontre des visages qu’elle va rencontrer". L’ironie de voir cette trentenaire, qui n’a rien accompli dans sa vie, assister les autres dans la recherche d’un emploi où ils s’épanouiront, ne nous échappe pas. C’est alors qu’entre en scène un type (Burke dont le nom du personnage n’est pas précisé dans le film), cheveux décolorés et ébouriffés, avec à son actif un bref séjour en prison pour infraction mineure. Soudain, la routine des questions-réponses prend des allures de speed dating, au beau milieu d'un mobilier de bureau terne et sans intérêt.

Commence alors un jeu de séduction effréné quoi qu’épisodique, faits de ghosting, de harcèlement psychologique, de traque et de manipulation, tous les termes modernes qui nous servent aujourd’hui à définir les rapports de force d’une relation. Il s’agit en fait d’une étude approfondie et sans complaisance pour chaque aspect de sa vie, du personnage de Kate, pendant qu’à chacune de leur interaction, le personnage de Burke change, que ce soit en matière de forme, de franchise et d’humeur. Les "vérités" dont il est question dans le titre semblent désigner le rapport que nous avons avec Kate en tant que public : pas un seul élément de sa vie trépidante, quelle que soit sa nature, ne nous échappe.

Les choix de Wootliff en matière de réalisation nous éblouissent davantage que ceux d’Only You [+lire aussi :
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, sorti en 2018, qui étaient plus pragmatiques. Dans True Things Ashley Connor, dont la collaboration avec la réalisatrice indépendante américaine Josephine Decker avait été remarquée, a respecté le ratio officiel approuvé par l'Académie. Il ne triche pas : dans les scènes de solitude, la caméra pose sur Kate un regard affectueux sans la faire passer pour une victime en désaccord avec l’environnement dans lequel elle évolue. La photographie un peu osée sert aussi l’histoire, lorsque plus tard, l’euphorie et les conséquences d’un trip à la kétamine improvisé, avec les tremblements intenses et les halos lumineux multicolores, sont montrées.

Certaines histoires récentes de tragédies romantiques de la fin du millénaire comme Fleabag se retrouvent dans True Things. Mais le travail de Woodliff est plus proche de celui d’Andrea Arnold et de Lynne Ramsay (en particulier dans son Morvern Callar [+lire aussi :
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). Ils ont en commun un voyage hors du Royaume-Uni dans la dernière partie du film, et une bande-son de musique alternative judicieusement choisie. L’atmosphère finalement optimiste du film de Woodliff s’articule autour de la jeunesse de Kate : son avenir et sa maturité tardive lui offrent un nouvel espoir, celui de reléguer tous les odieux Tom Burkes de sa vie dans un passé de plus en plus lointain.

True Things est une production britannique de Tristan Goligher de la société The Bureau, Ben Jackson et Jude Law de Riff Raff Entertainment, et Ruth Wilson pour Lady Lazarus Productions. BBC Films. Le BFI a également coproduit le film. Les ventes internationales sont assurées par The Bureau Sales

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(Traduit de l'anglais par Karine Breysse)

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