email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

CPH:DOX 2021 Nordic:Dox Award

Critique : Oh, It Hertz!

par 

- Ce documentaire par Gunnar Hall Jensen est une exploration méticuleuse de la relation intense de l’espèce humaine avec les sons et les émotions

Critique : Oh, It Hertz!

Comment réagiriez-vous si on vous appreniez que Joseph Goebbels et les nazis ont peut-être changé la fréquence standard de 432 à 440 Hz pour rendre les masses plus agressives et plus faciles à manipuler ? Dans quelle mesure la musique qu'on écoute depuis toujours a-t-elle changé depuis que ledit standard a été mis en place ? Voilà les deux questions complexes que pose Gunnar Hall Jensen dans Oh, It Hertz!, un documentaire fort étrange en lice dans la section Nordic:Dox Award de CPH:DOX. Cette théorie du complot est ce qui donne au personnage central du film, la musicienne américaine Laurie Amat, l'élan de commencer son propre périple pour découvrir la vérité, mais petit à petit, un thème plus vaste ressort : qu’est-ce que le son signifie pour nous ? Dans quelle mesure affecte-t-il et modifie-t-il nos émotions ?

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

Tous ces ingrédients semblent assez juteux pour constituer un documentaire remarquablement captivant. Laurie est une femme charismatique et excentrique, et une conteuse qui n'hésite pas à dévoiler des éléments importants de sa biographie, tous liés à ses sentiments et expériences personnelles par rapport à la musique et au son. Au fil de son parcours, elle rencontre plusieurs personnes qui ont, pour différentes raisons, développé un lien unique (dans certains cas presque une obsession) avec le son. Parmi ces témoignages figurent ceux de la percussionniste écossaise Evelyn Glennie, qui est sourde depuis l’âge de douze ans mais qui a appris à utiliser son corps comme une caisse de résonance, d'un homme norvégien nommé Stig Arne Skilbrei qui a survécu à un cancer et décidé de consacrer toute sa vie à la construction du système sonore optimal, pouvant rendre un son parfait, et de Yoko Sen, une musicienne électronique qui, après une grave maladie, s'est prise de passion pour la reformulation du vacarme des machines d'hôpital.

De temps en temps, le film montre des images d’archives d’un orchestre nazi jouant de la musique grandiose. On peut aussi voir Laurie contacter différentes archives pour réunir des informations sur la conférence mystérieuse de 1939 qui aurait changé la fréquence de la musique au niveau mondial, perturbée par l’idée que les nazis ont peut-être "contaminé" les chansons qu’elle écoute depuis toujours. Ces éléments pimentent les attentes du spectateur, avec lesquelles le film jongle tout du long à travers ses différentes interviews contrôlées et épisodes cinématographiques tandis qu'on accompagne Laurie dans son enquête sur le pouvoir du son. C’est incontestablement une errance fascinante, et techniquement de très bonne facture, grâce à photographie plaisante du chef-opérateur Måns Berthas et grâce au paysage sonore riche et captivant conçu par Øyvind Rydland, mais le spectateur peut finir par se sentir trahi. En effet, vers la fin, l’historienne de la musique Fanny Gribenski démantèle la théorie du complot sus-mentionnée en un clin d’œil, avec des arguments solides. Comme le thème central, celui de la relation entre le son et les émotions, est déjà fort et bien raconté, on pourrait se demander pourquoi il fallait que la prémisse du documentaire soit une théorie d'ores et déjà officiellement invalidée. Le supposé changement de fréquence de 1939 aurait pu demeurer sous forme d'élément secondaire dans l'intrigue, mais présenté différemment.

Par chance, cet aspect n'empêchera sans doute pas le spectateur d’apprécier les qualités indéniables de ce documentaire : une approche légère et joueuse de son sujet, un personnage central fort et un groupe d'intervenants brillants, une exécution technique remarquable et une structure narrative d'ensemble très claire qui happe le spectateur de bout en bout. Et il y a un autre petit joyau à mentionner : la séquence qui suit le générique de fin, pleine d’humour, vaut vraiment la peine d’être vue.

Oh, It Hertz! a été produit par Christian Aune Falch, Torstein Parelius et Ingrid Galadriel Aune Falch pour la société norvégienne UpNorth Film. Les ventes internationales du film sont gérées par l'enseigne canadienne Syndicado.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

(Traduit de l'anglais)

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Privacy Policy