email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

VISIONS DU RÉEL 2021 Compétition nationale

Critique : Sognando un’isola

par 

- Ce film d’Andrea Pellerani nous transporte sur une île onirique et quasi déserte où la nature se réapproprie petit à petit tout ce qu’on lui a enlevé

Critique : Sognando un’isola

Comme une carte postale venue du futur, Sognando un’isola, présenté en première mondiale dans le cadre de la compétition nationale de Visions du réel, semble nous offrir un aperçu de ce que le futur pourrait nous réserver si la Nature décidait de reprendre ce qui lui revient de droit. L’île japonaise d’Ikeshima, qui est au centre du nouveau film du réalisateur tessinois Andrea Pellerani, en est un exemple et peut être vue comme un laboratoire dans lequel on peut tester les conséquences d’un hypothétique renversement de pouvoir entre Homme et Nature. Que se passerait-il si la frénésie consumériste qui nous entoure cessait d’un coup ? Et si les armes avec lesquelles nous imposons notre bon vouloir sur les espaces qui nous accueillent arrêtaient de fonctionner ? Voici juste certaines des questions que soulève Sognando un’isola en nous catapultant dans un univers à la fois onirique et post-apocalyptique.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

L’histoire de l'île d’Ikeshima, que Pellerani a découverte presque par hasard lors d'un voyage au Japon, condense en elle passé, présent et futur. Une sensation d'atemporalité qui marque en profondeur le film, le rendant presque évanescent, comme une feuille qui volette dans le vent sans direction précise, mais avec la conscience d’exister. En à peine plus de 20 ans, la population de l'île, majoritairement composée de mineurs (et de leurs familles) employés pour l’extraction de charbon, a chuté de 10 000 personnes à pas tout à fait cent âmes. Un bouleversement dû à la fermeture de la mine, trop chère (et sûrement très peu sûre) par rapport à d’autres méthodes d’extraction, qui a, en à peine un an, transformé Ikeshima en une ville fantôme. Une décadence (du moins d’un point de vue anthropocentrique) qui met en évidence le manque de scrupules de l'Homme dans la manière dont il exerce sa force sur la Nature. Pouquoi Ikeshima, ses bars, ses restaurants, ses maisons et ses immeubles abandonnés provoquent-ils tant de nostalgie quand on les voit ? Pourquoi le silence et l'impossibilité de contrôler la Nature qui s’étend jusqu’à la démesure éveillent-ils tant de crainte? Et si la frénésie dont notre société consumériste est l’esclave nous avait étourdis au point de faire éclater ce lien indispensable qui nous rattache à la terre qui nous accueille ?

Sans se transformer en traité, Sognando un’isola nous force à nous confronter avec nos fantômes. Le film nous oblige à regarder le futur, du moins un futur possible, droit dans les yeux. Sognando un’isola adopte une double perspective : celle des anciens, qui se rappellent le passé avec nostalgie, et celle des (rares) jeunes vivant encore là, à savoir les deux seuls élèves de l’école, entourés de leurs très nombreux professeurs, qui semblent vivre l’absurdité de leur présent comme si de rien n’était. Le long-métrage met les liens personnels au centre de son dispositif filmique. Malgré l’effritement progressif des biens matériels, ce sont d'ailleurs les liens forts entre le peu d’habitants qui sont restés sur l'île, et aussi ceux qu'ils ont avec les nombreux chats qui la peuplent, qui permettent à cette communauté petite et presque utopique de survivre. Et si la "normalité" n’était au bout du compte qu’une construction de notre esprit ? Loin, très loin de nos habitudes consuméristes, ce film nous transporte dans un monde onirique sans lois ni temps, un lieu polarisé entre l’attrait de rassurantes habitudes du passé et la curiosité d'un futur dominé par la Nature et ses besoins (trop) longtemps étouffés.

Sognando un’isola, dédié à la mémoire de Tiziana Soudani, a été produit par Amka Films Production et la RSI Radiotelevisione svizzera. Les ventes internationales du film sont assurées par la société russe Antidote Sales.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

(Traduit de l'italien)

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Privacy Policy