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SAN SEBASTIAN 2020 Compétition

Critique : Au crépuscule

par 

- Sharunas Bartas est en lice pour le Coquillage d’or de San Sebastian avec ce récit sur un mouvement partisan lituanien créé pendant l’hiver 1948

Critique : Au crépuscule

Il neige, et c'est d'une tristesse... Évidemment, on parle d'un film du spécialiste du slow cinema Sharunas Bartas, qui s’est fait connaître dans les années 1990 avec les merveilles du cinéma de la lenteur Few of Us et A Casa avant de devenir démodé. Au crépuscule [+lire aussi :
bande-annonce
interview : Sharunas Bartas
fiche film
]
, qui se passe pendant l'hiver 1948 et où le souvenir de la Seconde Guerre mondiale est inscrit en grand sur les visages barbus d'hommes en treillis, détaille l'ascension du mouvement partisan en Lituanie. Le film a reçu le Label Cannes 2020 et il fait à présent sa première internationale en compétition au Festival de San Sebastian.

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"Chacun a sa vérité, mais je crois qu’il n'y en a qu’une", dit de dessous sa barbe blanche le propriétaire terrien Pliauga (Arvydas Dapsys) à son fils adoptif Unte (Marius Povilas Elijas Martynenko) dans un rare moment de confession. Il enjoint aussi à ce jeune homme de 19 ans de ne pas être un menteur, "comme moi". C’est probablement une information dont Unte est déjà largement conscient, ayant précédemment surpris Pliauga en train d’embrasser la bonne. L’ouverture est un drame familial à la Tchekhov dans une ferme où l'on trouve meurtre, adultère adultère et haine venimeuse, le tout dépeint dans le style austère, glaçant et misérabiliste du meilleur théâtre. On regrette qu'il n’y ait pas plus de scènes montrant l'épouse d'une froideur de glace de Pliauga (Alina Zaliukaite-Ramanauskiene), car dans le laps de temps bref dont elle dispose, elle paraît plus menaçante que l’Armée rouge. Mais il y a à peine assez de place pour elle, ou pour quelque femme que ce soit du reste, dans ce récit père-fils cerné par le sang.

Au crépuscule a été reçu avec quelque résistance lors de sa sortie dans son pays l’année dernière. Bartas a argué que c'est parce que le public, qui tend à voir les choses à travers des lunettes roses, à changer les faits et à se complaire dans la nostalgie, voulait que ses partisans soient plus héroïques et qu’ils finissent victorieux. En voyant le film, qui mérite bien sa place en compétition à San Sebastian, on se dit que Bartas a raison de ne pas vouloir réécrire l’Histoire juste aux fins de générer de la nostalgie-divertissement. C’est un film de guerre sur les sentiments, même si la plupart des personnages ont du mal à en ressentir eux-mêmes.

L’action se passe en pleine nature, dans des maisons construites aux flans de forêts et dans les bois. Les scènes d’intérieur sont éclairées à la chandelle et à la lampe à gaz, ce qui donne à ces images la palette d’un Rembrandt. La lumière brille fort sur les visages, un procédé dont l'utilisation est particulièrement efficace quand les partisans sont réunis autour d’une table pour parler tactique afin de libérer la Lituanie. Ce sont des visages vrais, pleins de marques, de taches et de rides. Le film de Bartas n’est pas tant un film de guerre qu'une étude à combustion lente sur le mensonge. D'aucuns trouveront la combustion trop lente, même s'il y a une grosse dose d’action quand les Soviétiques arrivent. Unte veut être un nationaliste héroïque, mais s'il sait contre quoi il se bat, sait-il pour quoi ? Dans cette ambiance hivernale, on n'est pas étonné que tout le monde craigne d'être trahi par le voisin. Est-ce qu'Unte s'avèrera meilleur que Pliauga ? C’est la grande question, dans un film qui marque pour Bartas un retour qui se faisait attendre, sans atteindre toutefois les hauteurs de ses réalisations passées.

Au crépuscule est une coproduction entre la Lituanie, la France, la République tchèque, la Serbie, le Portugal et la Lettonie qui a réuni les efforts de Sharunas Bartas, Jurga Dikciuviene (Studija Kinema) et Janja Kralj (KinoElektron) en coproduction avec Artemio Benki (Sirena Film), Nikolina Vucetic Zecevic (Biberche Productions), João Matos (Terratreme Filmes) et Gints Grube (Mistrus Media). Les ventes internationales du film sont assurées par Luxbox.

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(Traduit de l'anglais)

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