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BRIFF 2022

Cédric Bourgeois • Réalisateur de Krump

"Je suis heureux d’avoir pu prendre des risques avec ce film"

par 

- Le jeune cinéaste belge parle de son premier long métrage, une comédie désespérée qui suit les tribulations tragicomiques d'un ex-acteur de porno

Cédric Bourgeois • Réalisateur de Krump

Rencontre avec le jeune cinéaste belge Cédric Bourgeois, qui présente au Brussels International Film Festival en Compétition Nationale son premier long métrage, Krump [+lire aussi :
critique
interview : Cédric Bourgeois
fiche film
]
, une comédie désespérée qui suit les tribulations tragicomiques d'un ex-acteur de porno qui doit trouver une somme d’argent démesurée pour sauver sa fille, victime d’un kidnapping.

Cineuropa : Quelles sont les origines du projet ?
Cédric Bourgeois :
A l’origine, je travaillais sur un autre projet plus proche de mes courts métrages, assez noir et malaisant, et ça s’enlisait un peu dans l’écriture. Le Centre du Cinéma a lancé un appel à projets, petits budgets, on avait deux ans pour finir le film, il fallait juste déposer 5 pages de synopsis. Je me suis dit que c’était le bon moment pour essayer autre chose. J’avais envie de légèreté, d’aller vers la comédie.

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Cela faisait longtemps que j’avais envie de travailler avec Jean-Benoît Ugeux, que j’avais fait tourner dans des rôles très durs, mais que je voyais souvent dans des comédies. Je crois que je voulais faire un feel-good movie, sortir de la noirceur. Bon, finalement ça ne s’est pas exactement passé comme ça (rires). C’est une grosse prise de risque, de ne pas aller dans la continuité de son travail, j’ai eu beaucoup de doutes.

La comédie vient du fait que vos personnages sont confrontés à des situations auxquelles ils ne sont pas préparés, ce qui finit par tendre vers le tragique. Comment s’est passé ce tournant ? Ancrer la comédie dans la réalité, ce n’est plus si drôle que ça ?
J’ai été rattrapé par des réflexes développés sur mes courts métrages. J’ai souvent filmé des gens à la marge, qui se retrouvent la tête sous l’eau, pris dans des choses qui les dépassent, et qui doivent survivre à l’évènement. C’est quelque chose qui est arrivé tout de suite, il ne fallait pas créer un super-héros, mais un homme ordinaire. De là nait la gaucherie, la maladresse qui fait rire, mais aussi le désespoir. J’ai voulu m’amuser avec ça. Dans la vie, je ris souvent avec mes amis de choses désespérantes. Mais quelque part ça permet de tenir. J’aime ce genre de comédies, que l’on retrouve chez les frères Coen, les frères Safdie, ou Todd Solondz, mais aussi dans le cinéma belge, les films de Xavier Seron ou Benoît Mariage par exemple.

Mais bon, en fin de compte, c’est très instinctif la comédie, on n’y a pas vraiment réfléchi. On se connaît très bien avec Jean-Benoît Ugeux, avec Xavier Seron qui s’est joint à nous pour l’écriture à la fin, avec Jean-Jacques Raisin qui joue le pote du héros, et on s’est beaucoup inspiré de nous. On a partagé nos moments de joie, mais aussi nos emmerdes, et on a réussi à en rire.

Comment avez-vous imaginé le personnage de Frank, aka Ronald Krump ?
Au début, on est parti de la figure de Donald Trump. Un gars vulgaire et filou, j’imaginais un humour très acide, un personnage qui puisse parfois être malhonnête, pour lequel on n’a pas forcément d’empathie.

A l’écriture, Frank s’est vite transformé en loser. En fait, c’est Trump, mais après la défaite. Limite qui se retrouve à la rue. Et puis c’est avant tout quelqu’un qui est dans la survie, au quotidien. On a pas mal travaillé la relation avec sa fille. Frank est père, et c’est par là que revient l’empathie. Il a évidemment envie d’être un bon père, mais la paternité, comme la maternité, c’est quelque chose que l’on idéalise beaucoup. Etre un bon père, ce n’est pas toujours simple. Frank, c’est peut-être la dernière chose qui lui donne encore un peu d’espoir, et qui fait ressortir son humanité. Sans sa fille, c’est un juste un connard.

Quelle texture vouliez-vous pour le film ?
J’ai tout de suite vu un film sale, une image un peu crasseuse. Il y a beaucoup de grain, le point est parfois un peu flou. Ce n’est pas seulement un clin d’oeil cinéphile à des films que je peux aimer, c’est aussi pour raconter quelque chose. La lumière et les décors racontent aussi les personnages pour moi, même s’il faut veiller à ne pas en faire des artifices. Et puis le milieu porno, ce n’est plus vraiment reluisant aujourd’hui. L’industrie du porno a complètement décliné, maintenant tout se fait au smartphone, dans des caves, on est dans une vraie misère sociale, on avait aussi envie de creuser ça. Avant il y avait des costumes des scénarios, ça pouvait encore faire rêver, aujourd’hui c’est devenu très brut.

Ce film, il parle aussi de désenchantement, de désillusion. Quelque chose qui me parle dans un certain cinéma américain des années 70. Easy Rider, Macadam Cowboy, des gens qui se disaient : on avait tout pour vivre dans un monde super cool, et on a tout foiré. On fonce droit dans le mur. Krump est devenu beaucoup plus noir quand a débarqué la crise du Covid. Oui, le film est un peu désespéré. J’espère qu’un jour, je ferai vraiment un vrai feel-good movie, à la Full Monty. C’est de ça dont j’avais envie, mais le désenchantement nous a un peu rattrapés.

Que vous a apporté le fait de tourner en conditions légères ?
La liberté de création. Le film a ses faiblesses évidemment, mais je suis heureux d’avoir eu la possibilité de prendre des risques.

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