email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

CANNES 2022 Quinzaine des Réalisateurs

Fabian Hernandez • Réalisateur de Un varón

“Par rapport à d’autres films colombiens, je pense que mon approche est plus profonde et plus respectueuse des gens et de ce quartier”

par 

- CANNES 2022 : Ce récit dramatique d’apprentissage colombien montre que ce qui fait un homme, un vrai, ce sont ses valeurs fondamentales

Fabian Hernandez  • Réalisateur de Un varón

Dans Un varón [+lire aussi :
critique
bande-annonce
interview : Fabian Hernandez
fiche film
]
, projeté à la Quinzaine des Réalisateurs de Cannes, le Colombien Fabian Hernández brosse un tableau intime des codes de la masculinité dans la société latino-américaine. Nous avons rencontré le réalisateur pour l'interroger sur son lien émotionnel à ce sujet et son désir de représenter son pays d’origine sans l’exploiter, en adoptant une approche plus respectueuse que ce qu'on voit habituellement.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)
Hot docs EFP inside

Cineuropa : Pourquoi souhaitiez-vous raconter cette histoire ?
Fabian Hernández :
Le film procède de souvenirs que j'ai de mon adolescence. Je vivais dans le quartier que l’on voit dans le film, et mes parents y habitent encore. C’est au centre de Bogotá. C’est un quartier malheureusement très connu pour ses importants problèmes sociaux, comme le trafic de drogue et la violence. J’ai aussi appartenu à une bande assez violente. Plus tard, quand j’ai commencé à réfléchir aux raisons pour lesquelles cet univers m’intéressait, je me suis rendu compte que c'est parce que je voulais incarner une certaine forme de virilité. J’y réfléchis souvent depuis. Ça doit venir de ce qu’on nous apprend à l’adolescence, pour qu'on soit à même de grandir dans ce genre de contexte. À cet âge-là, il est très important de faire partie d’un groupe et de se sentir accepté. Je me souviens que j'avais, adolescent, beaucoup d’inquiétudes que je ne pouvais pas exprimer devant les autres. Je pense beaucoup à tout cela, aujourd'hui, et je voulais en parler dans ce film.

C’est une image plutôt sombre que vous montrez ici.
Je trouve qu'il y a dans le film un certain optimisme. Le personnage arrive à prendre des décisions, même s'il est certain que le contexte où il se trouve sera toujours difficile et qu'il n'est pas possible de changer la réalité qui est la sienne. Je voulais montrer quelque chose qui laisse de la place à l’ambition de chacun. Ce genre de quartiers ou de pays perpétue la même dynamique : le passé, le présent et le futur changent peu. Il n’y a pas tellement d’espoir pour le futur. L'espoir, pour moi, le personnage le porte en lui. Il a la possibilité de choisir, comme moi. Moi aussi j’ai choisi d’arrêter de fréquenter les mauvaises personnes.

Vous semblez réticent à utiliser le modèle typique de la majorité des films d’Amérique latine.
Souvent, les personnages qui vivent dans ce genre d'endroit sont décrits comme des victimes ; ils n’ont quasiment aucun moyen de décider de quoi que ce soit. Pour moi, il était important d’avoir des personnages qui parlent, qui s’expriment. Je ne voulais pas me contenter de montrer la violence superficielle des gangs, comme le font la plupart des films. On y voit des quartiers pauvres, des gangs, des jeunes sans opinions et sans possibilité de choisir d'être non-violents. Contrairement à mon personnage principal qui, lui, renonce à la violence. Je ne voulais pas reproduire les images que nous connaissons déjà. Dans beaucoup de films, la drogue fait figure de stigmate incontournable, surtout dans les films colombiens. Je vois les équipes de tournage arriver, filmer le quartier puis partir sans jamais revenir. Ça me met en colère : c’est une forme d’exploitation et ça produit une économie fondée sur des clichés, une économie fondée sur la souffrance des autres. Il était important pour moi de faire les choses différemment. Mon héros ne se mêle ni de drogue, ni de violence. Ce qui m’intéresse, ce sont les émotions des gens et l’intimité. Je pense que mon approche est plus profonde et respectueuse des gens et de ce quartier.

La morale principale de votre film est donc que nous avons toujours le choix, même dans les situations désespérées ?
Oui, c’est toujours possible, de réfléchir et de choisir, mais mon film traite également de la pression sociale qui nous pousse vers quelque chose qui ne nous convient pas forcément. La société, quel que soit le contexte, nous pousse à adhérer à tel ou tel code et nous façonne pour que nous nous y conformions.

Comment avez-vous trouvé votre acteur principal ?
Je sortais tous les jours dans le quartier et je le cherchais. Un jour, j’ai été invité à un concert de rap : c’est là que je l’ai rencontré. Il était là, entouré de plusieurs hommes grands et forts et dans ses yeux, j’ai vu un désir ardent de faire partie de leur cercle.

Comment l’avez-vous préparé à jouer ce personnage ?
Nous avons beaucoup parlé et partagé beaucoup de moments de nos vies quotidiennes. Nous n’avons pas énormément répété et je ne lui ai donné aucun dialogue à mémoriser, juste le contexte et quelques indications. Ce personnage est un mélange de mes expériences et des siennes.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

(Traduit de l'anglais par Marine Régnier)

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Lire aussi

Privacy Policy