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CANNES 2021 Compétition

Julia Ducournau, Vincent Lindon • Réalisatrice et acteur de Titane

“Pendant les 25 premières minutes, on se dit : 'Mais attends, je suis où ?!'. Et puis on sait : dans une histoire d’amour”

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- CANNES 2021 : Dans le film qu’elle présente en compétition, la réalisatrice française présente le duo le plus étrange depuis La Forme de l’eau

Julia Ducournau, Vincent Lindon  • Réalisatrice et acteur de Titane

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de Julia Ducournau, présenté en compétition officielle au Festival de Cannes, n'a laissé personne indifférent par sa manière de mélanger de la violence, des voitures montrées comme des objets sexuels et des liens d’affection tendres qui se développent entre Alexia (Agathe Rousselle), une tueuse en cavale avec une plaque de titane sur le côté du crâne, et un pompier (Vincent Lindon) convaincu qu'elle est son fils Adrian, disparu depuis longtemps. Nous avons interrogé Ducournau et Lindon pour en savoir plus sur le film.

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[où une jeune végétarienne développe soudain un appêtit vorace pour la chair], vous semblez être très intéressée par le corps et tous les changements extrêmes qu'il peut subir. Comment voyiez-vous les choses cette fois-ci ?
Julia Ducournau :
C’est ce qui m’aide à créer un lien entre le public et mes personnages. L’héroïne, Alexia, peut sembler moralement répréhensible et le genre de personnage avec lequel on ne peut pas se rapporter – et à juste titre : c’est une psychopathe. Le seul biais que je pouvais utiliser, pour qu'on la suive et qu'on accepte de traverser ce qu’elle traverse, était de nous faire sentir ce qu’elle sent. Physiquement, aussi. Quand on voit de la douleur à l’écran et qu'on la ressent dans sa chair, ça crée un lien très, très fort.

On peut aussi voir cette douleur dans votre personnage, Vincent. Il semble tellement fort et viril, c'est presque un stéréotype, mais il y a une fragilité aussi.
Vincent Lindon :
Ce que j’aime chez lui, et dans le film en général : c’est que les hommes qui sont plus "virils" cachent généralement leur côté féminin. C’est un pompier fort, mais j’ai tenté de l’aborder comme j’aborderais un personnage féminin. C'est quelqu’un de très sensible, qui est complètement perdu et qui attend de rencontrer quelqu’un, n’importe qui, alors quand il rencontre, pour la première fois, quelqu'un avec qui il se sent bien [qui est Alexia], il l'accepte sans se poser de questions.

J’aime ce personnage qui semble tellement fort à l'extérieur et à l'intérieur, il y a tellement de tendresse, de gentillesse et tout simplement d’humanité. Plus je me préparais, avant le film, plus je faisais de muscu pour modeler mon corps, plus je me sentais comme Agathe. Ça me paraît difficile de dire quelle est la différence entre elle et moi. Elle est Adrien, et je suis Vincent Legrand, mais pour moi, ce sont juste deux personnes. C’est une histoire vieille comme le monde, pourrait-on dire, car les fils de Julia parlent toujours du même sujet : l’amour.

C’est une histoire qui parle d’amour, mais aussi de famille. Ces deux personnages trouvent certainement un refuge l’un dans l’autre. Comment voyiez-vous ce lien peu commun se former ?
J.D. :
En créant cette impression d’amour inconditionnel, cet amour absolu, c’est ça que je voulais faire. Ce que je voulais dire, et montrer, c’est que ces gens, qui ne sont clairement pas destinés à se soucier l'un de l'autre, qui ne sont même pas destinés à se rencontrer, peuvent malgré tout trouver en l'autre ce dont ils ont besoin. À vrai dire, s'ils devaient se rencontrer dans d’autres circonstances, peut-être même qu'ils se tueraient l'un l’autre ? Ce sont des titans, prêts pour la bataille. On s’attend presque à ce qu'il y ait clash. Et pourtant les voilà qui fondent cette nouvelle famille, en dehors des liens sociaux. Je voulais montrer qu'en fait, on peut choisir qui on va devenir. En tant que personne, mais aussi en amour.

V.L. : Si on ne me laissait que deux secondes pour dire ce que j’aime dans ce film, ce serait ce couple : c’est lui et elle, c’est lui et lui, c’est elle et elle. Voilà. Ça m'est égal de savoir d'où ils viennent, quelle est la couleur de leur peau ou de quel sexe ils sont : ce sont juste deux êtres humains qui se réunissent. C’est plus fort que n’importe quoi dans le monde. C’est la seule chose que je vois dans ce film. C’était exactement la même chose dans La Forme de l’eau de Guillermo Del Toro. Pendant les 25 premières minutes, on se dit : "Attends, je suis où là !?". Et puis on sait : on est dans une histoire d’amour. Ça ne parle que d'amour, et c'est la seule chose qui m'intéresse personnellement aussi, y compris dans ma vie quotidienne. Mais ce que j’ai le plus aimé, c’est la manière dont Julia en parlait, parce que sa voix est complètement fraîche et complètement différente. Très rock ‘n’ roll, très bizarre, très spécial. Quand j'ai terminé le scénario, quand j’ai lu la toute dernière page, je l’ai appelée et j'ai juste dit : "oui, oui, oui". Tout de suite. Aussi parce que ça m’a fait pleurer.

J.D. : Il y a cette phrase du célèbre écrivain et philosophie français Michel de Montaigne, qui avait une relation très spéciale avec un autre écrivain français, Étienne de la Boétie. Il disait, en évoquant leur lien, qui était également absolument intense : "Si on me presse de dire pourquoi je l'aimais, je sens que cela ne peut s'exprimer qu'en répondant : 'Parce que c'était lui, parce que c'était moi'". Et c’est tout ce qu’il y a à savoir.

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(Traduit de l'anglais)

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