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BERLINALE 2021 Panorama

Damien Odoul • Réalisateur de Théo et les métamorphoses

“Je veux mettre à l’épreuve les habitudes du public et prendre des risques pour le faire”

par 

- BERLINALE 2021 : Nous avons interviewé le metteur en scène français sur son film expérimental

Damien Odoul  • Réalisateur de Théo et les métamorphoses
(© Marie Eve Nadeau)

Damien Odoul a présenté son nouveau film expérimental, Théo et les Métamorphoses [+lire aussi :
critique
bande-annonce
interview : Damien Odoul
fiche film
]
, dans la section Panorama de la Berlinale. Pour réaliser ce film, il s'est immergé au fin fond de la forêt avec ses deux personnages principaux. Le résultat est une œuvre hautement évocatrice et énigmatique, qui défie les habitudes de visionnage du public et présente un acteur principal très impressionnant dans le rôle de Théo. Entretien avec le réalisateur français sur la création du film et sur son engagement dans le champ du cinéma.

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Cineuropa : Comment avez-vous rencontré Théo, et comment est-il devenu votre personnage principal ?
Damien Odoul
: Je l'ai rencontré grâce au théâtre. Il est à la fois acteur et danseur. À vrai dire, au début, je prévoyais de travailler avec un autre jeune homme dans le rôle principal, Kostia Botkine. Nous avons travaillé ensemble pendant deux ans, mais malheureusement, il a dû abandonner. Ses médecins ont refusé de le laisser jouer le rôle. Kostia est également atteint de trisomie, mais il présente aussi des éléments autistiques et schizophréniques. C'est quelqu'un de très intéressant, un véritable artiste. Il écrit les chansons du seul groupe de rap existant qui soit composé de personnes trisomiques. Kostia est plus un poète et un artiste visuel, tandis que Théo tient plus de l'artiste de scène, c'est-à-dire qu'il a plus d'affinités avec la notion de jeu d'acteur.

Et comment avez-vous trouvé l'acteur qui joue le rôle du père de Théo ?
Pierre Meunier est le directeur artistique du théâtre Le Cube, qu'il dirige avec Marguerite Bordat. Théo adore le théâtre, et Pierre l'a emmené avec lui dès qu'ils se sont rencontrés. Assister à leur rencontre a été très intéressant.

Combien de temps avez-vous passé avec eux ?
Nous nous sommes rencontrés un mois avant le tournage en forêt. On avait du pain sur la planche. Il fallait qu'ils s'habituent à ma façon de travailler, et je voulais qu'ils s'adaptent à cet environnement. Ils devaient donc s'immerger dans la nature, mais aussi dans l'état mental spécifique dont nous avions besoin pour les personnages.

Aviez-vous un scénario ?
Pour moi, le processus d'écriture ne s'arrête pas avant le tournage. Il comporte trois phases : il commence, évidemment, avant le tournage, mais il se développe pendant le tournage et change à nouveau au cours du montage. C'est ce que j'ai appris ces dernières années en faisant des films. L'écriture est liée au rythme du film et pour moi, le cinéma, c'est justement ce rythme. L'écriture est le nerf du personnage principal, le nerf de Théo. C'est aussi le nerf du montage. Le rythme de mon cinéma est déterminé par son propre nerf, comme un battement cardiaque.

Y a-t-il des séquences que vous avez dû couper au montage ?
Le montage a pris un an. On avait beaucoup d'images et, comme je l'ai dit, j'ai aussi réécrit le film pendant le montage. Ça a donc pris beaucoup de temps, et à cet égard, c'est sans doute le projet le plus difficile sur lequel j'ai jamais travaillé.

Ça semble très courageux d'être toujours ouvert aux changements pendant toute la fabrication du film.
À mon avis, ce n'est pas une question de courage. Je pense qu'en tant qu'artiste, il est nécessaire d'accepter en bloc tous les risques liés à la création d'une oeuvre. Je veux mettre à l'épreuve les habitudes de visionnage du public et prendre des risques pour le faire.

Vous avez employé différentes techniques pour composer les images. Pouvez-vous nous en dire plus sur votre vision esthétique pour ce film ?
Je savais avant même qu'on ne commence à quoi je voulais que le film ressemble. C'était un aspect important du travail. Je savais que je voulais utiliser les pièges photos dont se servent les chasseurs. J'ai moi-même vécu des années en forêt, je sais à quoi elle ressemble et je souhaitais rendre cela dans le film. Mon idée était de mélanger différentes dimensions cinématographiques que je trouve intéressantes. C'est pour ça que j'ai fait contraster les images vidéo avec des images bien plus sophistiquées, par exemple.

Comment avez-vous élaboré le texte dit par Théo ? Qu'est-ce qui vous a inspiré pour l'écrire ?
Le texte est censé être une voix intérieure. C'était important qu'on trouve son émotion en Théo. Je savais qu'au début, ce serait complètement à côté. J'ai dû le retravailler plusieurs fois. Mon inspiration vient de la littérature plus que du cinéma, plus spécialement de la poésie, qui pour moi est pareille à un chant. Un chant comme l'Odyssée. Je pense à l'Ulysse de l'Antiquité, mais aussi à celui de James Joyce. Comme Joyce, je voulais me concentrer sur un lieu, et plus ou moins sur une journée.

Qu'est-ce qui est le plus important pour que le spectateur comprenne le point de vue de Théo ?
La relation entre son père et lui est très importante. Son but est de se débarrasser de son père. Il veut avoir la scène pour lui seul et pour y parvenir, il pourrait s'avérer nécessaire d'aller jusqu'à tuer son père.

A-t-il été difficile de trouver des financements pour le film ?
J'ai eu la chance de pouvoir travailler avec Alexandre Perrier, qui a eu le courage de travailler avec moi. Je pense qu'on a besoin de plus de producteurs comme lui, qui sont eux-mêmes cinéastes et qui sont prêts à se battre pour une certaine idée du cinéma.

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(Traduit de l'anglais par Alexandre Rousset)

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