email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

SUNDANCE 2021 Compétition World Cinema Documentary

Hogir Hirori • Réalisateur de Sabaya

“Certaines situations étaient dangereuses ; quand je me suis rendu compte qu’elles faisaient partie du quotidien des gens, j’ai été abasourdi”

par 

- Entretien avec le réalisateur suédois, dont le documentaire a été présenté à Sundance, dans la section World Cinema Documentary Competition

Hogir Hirori • Réalisateur de Sabaya

Pour son documentaire Sabaya [+lire aussi :
critique
interview : Hogir Hirori
fiche film
]
, dont la première mondiale a eu lieu au Festival du film de Sundance, le réalisateur suédois Hogir Hirori a visité un camp syrien où sont détenus des soldats de Daech. Un grand nombre de femmes yézidies kidnappées et réduites en esclavage sexuel par ces mêmes combattants de l'EI n'ont toujours pas été libérées. Le film suit des volontaires qui risquent leur vie pour ramener ces femmes, que l'EI appelle sabayas, à leurs familles. Le réalisateur nous en dit plus sur le tournage du film et la situation de ses personnages.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

Cineuropa : Comment avez-vous organisé le tournage ?
Hogir Hirori : J'avais connaissance du centre yézidi et je suis allé en Syrie pour faire des recherches. J'y ai rencontré Mahmud, un bénévole qui se charge de retrouver et sauver les femmes yézidies dans l'un des grands camps où sont détenus les soldats de Daech. J'ai dû obtenir des permis spéciaux pour le tournage. En règle générale, les journalistes peuvent obtenir un permis pour entrer dans le camp, mais on ne les autorise qu'à rester deux heures, et on leur dit ce qu'ils ont le droit de filmer. J'avais besoin d'un permis qui me permette de rester beaucoup plus longtemps, plusieurs jours en fait. De plus, j'avais besoin de l'autorisation de filmer à la fois à l'intérieur et à l'extérieur du camp. J'ai dû faire jouer mes contacts en Syrie et en Suède pour y parvenir.

Combien de temps a duré le tournage ? Et quelle quantité de matériel vidéo aviez-vous quand vous avez terminé ?
En tout, ça a pris un an et demi, et je suis allé en Syrie six fois. À la fin, on avait 90-92 heures d'images sur lesquelles travailler.

A-t-il été difficile d'obtenir des financements pour le film ?
Je suis d'abord parti seul en Syrie. Je voulais vérifier la faisabilité du projet. Ensuite, on a commencé à chercher des financements. Pendant toute cette étape, j'ai eu la chance de travailler avec le producteur Antonio Russo Merenda. Il fallait qu'on fasse attention à ne pas trop parler du projet, pour protéger toutes les personnes impliquées. Il n'y a donc pas eu de pitch ou de présentations à proprement parler. On a eu de la chance que l'Institut suédois du cinéma et la Commission suédoise du cinéma aient compris l'importance du projet et nous aient soutenus.

Comment avez-vous fait pour aborder les hommes du centre yézidi ?
J'ai visité le centre et je ne leur ai parlé du projet de documentaire qu'au bout de trois jours, et c'est à ce moment qu'on a fait la première interview courte. Au début, ils ne me faisaient pas confiance ; ils étaient suspicieux. Mais après avoir passé jour et nuit ensemble, la confiance a commencé à s'établir. C'était très important d'en arriver là, car nous devions compter les uns sur les autres compte tenu de la situation dangereuse dans laquelle on se trouvait.

Vous êtes-vous senti en danger ?
Je savais dans quoi je m'embarquais, mais par moments, j'avais quand même peur. Certaines situations étaient dangereuses ; quand je me suis rendu compte qu'elles faisaient partie du quotidien des gens, j'ai été abasourdi.

Avez-vous utilisé des caméras cachées ?
Pour certaines scènes dans le camp, oui, on a utilisé des caméras cachées. Mais quand il fallait interagir avec les personnages , la caméra était toujours visible. Je ne voulais pas les prendre par surprise. Je leur parlais toujours avant de filmer, donc je leur demandais leur permission.

Est-ce que ça a été difficile de convaincre les femmes de parler ouvertement devant la caméra ?
Je ne leur ai jamais imposé aucune interview. J'étais en standby et je commençais par leur parler avant de leur demander si je pouvais filmer leur histoire.

Vous êtes-vous retrouvé avec des images plus sensibles que vous avez décidé de ne pas inclure dans le film ?
Il y avait des images que je n'ai pas mises dans le film pour des raisons de respect de la vie privée, et surtout de sécurité. Il était très important de ne pas montrer certains lieux, pour que les soldats de Daech ne puissent pas les identifier et se servir des images pour planifier leurs attaques.

Que se passe-t-il une fois que les femmes ont été secourues ? Comment sont-elles vues et traitées par leur famille ?
La religion yézidie dit que c'est une bonne chose lorsqu'elles reviennent, et qu'elles doivent être bien traitées. Les hommes qui veulent les épouser sont vus comme des gens bien. Et beaucoup de ces femmes sont effectivement mariées. Certaines intègrent les programmes proposés par des organisations spécialisées ; certaines partent à l'étranger, en Allemagne ou au Canada par exemple.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

(Traduit de l'anglais par Alexandre Rousset)

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Lire aussi

Privacy Policy