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FANTASIA 2020

Johan von Sydow • Réalisateur de Tiny Tim – King for a Day

“Tiny Tim pouvait s’intégrer partout, même s’il était extrême”

par 

- Nous avons interrogé le réalisateur suédois Johan von Sydow sur son documentaire Tiny Tim – King for a Day, et sur un homme qui semblait d’une autre planète

Johan von Sydow  • Réalisateur de Tiny Tim – King for a Day
(© Andreas Ide)

Présenté en première mondiale au festival FanTasia, le film Tiny Tim - King for a Day [+lire aussi :
interview : Johan von Sydow
fiche film
]
de Johan von Sydow (dont la distribution en salles est déjà prévue en Suède et aux États-Unis à l’automne) illustre les beaux jours et les nombreux orages qu’a vécus le chanteur Herbert Khaury, alias Tiny Tim, artiste que le temps a balayé de notre mémoire, mais encore présent dans l’esprit de "Weird Al" Yankovic.

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Cineuropa : comment avez-vous entendu parler de Tiny Tim ou quand avez-vous décidé d’en parler à votre équipe ? Lors du visionnage de votre film, je n’ai pas pu m’empêcher de me demander si ce n’était pas en réalité un documenteur.
Johan von Sydow :
Ei si l’on faisait croire que c’en est vraiment un ? Que Tiny Tim n’a jamais vraiment existé ? L’un de mes films a eu pour sujet l’artiste suédois [Nils Olof Bonnier], disparu dans les années 60. Lors d’une interview, l’un de ses amis avait mentionné le nom de Tiny Tim avant de rire jusqu’aux larmes. Il fallait que j’en apprenne plus sur lui. Il ne m’a pas fallu longtemps avant de me demander : "Mais c’est qui ce gars ?!" Cette découverte, je l’ai faite alors que mon ami et collègue Malik Bendjelloul travaillait sur son film Sugar Man [+lire aussi :
bande-annonce
fiche film
]
. Je me suis dit : "S’il peut réaliser un film sur un artiste américain, je ne vois pas pourquoi je ne le pourrais pas." Peu après, j’ai fait la connaissance de Justin Martell, auteur de la biographie de Tiny Tim, Eternal Troubadour: The Improbable Life Of Tiny Tim.

Le New York Times a dit qu’il "flirtait prudemment avec la célébrité". C’est l’histoire de quelqu’un qui a touché du doigt le succès. Tout ça m’a fait penser au Joker : après une vie remplie d’adversités, seule la reconnaissance d’autrui pouvait lui apporter le bonheur.
Il avait besoin d’être au centre de l’attention. Tout le monde le disait, il fallait qu’on le regarde. L’attention d’une seule personne lui suffisait. En lisant ses journaux intimes qu’il noircissait tous les jours, je peux attester que cet homme est la personne la plus dingue à avoir connu la célébrité. C’est désobligeant dit comme ça, il n’était pas "dingue" à proprement parler. Il avait des sortes de troubles du comportement, et ses parents voulaient l’envoyer en hôpital psychiatrique.

Selon moi, il avait compris très tôt qu’il était la cible de moqueries. Mais si cela voulait dire être sous les projecteurs, il s’en accommoderait ! Qu’on parle de lui en bien ou en mal ne lui importait peu, l’important était qu’on parle de lui. Johnny Pineapple, un ami qui l’a accompagné durant les dernières années de sa vie, a dit de lui qu’il était « l’homme le plus intelligent qu’il avait jamais rencontré. » Il lisait beaucoup et avait des connaissances étendues.

C’est marrant que vous mentionniez Sugar Man puisque votre film dépeint lui aussi une figure énigmatique.
Jusqu’à sa mort, on disait de lui qu’il était un Has been en quête d’un succès révolu. Ce qu’il avait réussi à accomplir le rendait toujours, ou presque, heureux. Il répétait souvent : "J’ai eu mon heure de gloire. Peu de gens peuvent en dire autant." Il semblait satisfait de sa situation, en public du moins. Seuls ses journaux intimes trahissaient ses idées noires. On le prenait pour un OVNI : cheveux longs, tout de blanc maquillé à chanter le falsetto ! Il devait venir d’une autre planète, aucune autre personne ne lui ressemblait. Et pourtant, on peut lire dans ses écrits : "Un jour, je serai une grande star." Et il a atteint son objectif ! C’est assez important pour être souligné.

Ce n’est personne d’autre que le chanteur "Weird Al" Yankovic qui narre le film.
On recherchait quelqu’un que Tiny connaissait personnellement. Jim Carrey avait été envisagé ; à l’époque des rumeurs disaient qu’il voulait lui donner vie sur le grand écran. On avait aussi pensé à Bob Dylan. Oui, on était vraiment enthousiastes. "Weird Al" et Tiny avaient travaillé ensemble sur plusieurs séries. D’ailleurs, les gens les pensaient père et fils ! Il m’avait dit qu’une fois, à un concert de Ringo Starr, les projecteurs s’étaient mis sur "Weird Al" et Ringo l’avait présenté en ces mots : "Une personne toute spéciale est parmi nous ce soir : M. Tiny Tim !"

J’ai un souvenir impérissable de la fois où j’ai demandé à Wavy Gravy, figure emblématique du mouvement underground des années 60, s'il connaissait le bord politique de Tiny. "Il partageait les mêmes opinions que nous, je suppose", avait-il dit. Pas vraiment, c’était un conservateur invétéré. Il soutenait la guerre au Vietnam et avait voté Nixon. Malgré son mode de vie extrême, il s’intégrait partout où il passait. Croyant à la sexualité ambiguë, Tiny mettait un point d’honneur à confier ses moindres pensées à Dieu. Comme mentionné tout au long de ses journaux intimes, c’est la raison pour laquelle il laissait la mafia gérer ses affaires. Ils le surveillaient constamment de peur qu’il ne s’enfuie avec une femme ! Cette partie de sa vie était une source de torture inépuisable.

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(Traduit de l'anglais par Alexandre Descamps)

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