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LANZAROTE 2019

Sebastian Brameshuber • Réalisateur de Movements of a Nearby Mountain

"Mon film est plus proche de la poésie que de la prose"

par 

- Avec son troisième long-métrage, Movements of a Nearby Mountain, l’Autrichien Sebastian Brameshuber a participé à la 9e Muestra du cinéma de Lanzarote

Sebastian Brameshuber • Réalisateur de Movements of a Nearby Mountain
(© Muestra de Cine de Lanzarote)

La neuvième édition de la Muestra de Lanzarote a accueilli en sélection officielle Movements of a Nearby Mountain [+lire aussi :
critique
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interview : Sebastian Brameshuber
fiche film
]
de Sebastian Brameshuber, qui a décroché le Grand Prix Cinéma du Réel 2019. Dans le centre culturel El Almacén, siège du formidable festival canarien, nous avons rencontré le réalisateur.

Cineuropa : Comment décririez-vous les réactions du spectateurs aux différents festivals où vous avez présenté votre documentaire après l'événement parisien ?
Sebastian Brameshuber :
Après Cinéma du Réel, le film a été présenté à une vingtaine de festival, dont deux autrichiens. Toutes ces expériences ont été différentes, parce que le film a toute une série de niveaux de lectures, parmi lesquels figurent le langage et ses différents accents. Comment il a été tourné en Autriche, là-bas, les gens ont mieux perçu cela et davantage réagi par rapport à cet aspect du film que par exemple ici, à Lanzarote, où je suis très honoré d’être reçu par la Muestra de Cine. En général, on note parmi les spectateurs beaucoup de concentration pendant le film : ce n’est pas un documentaire difficile, mais il exige une certaine sensibilité pour le percevoir, parce qu’il faut accepter sa vitesse, son espace et le dialogue qu'il établit avec des sujets un peu particuliers.

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Il a aussi une aura de mystère...
Exact : il y a beaucoup de moments réels, mais des moments un peu irréels, les deux séparés par une ligne très fine. Par exemple, quand le personnage, Cliff, emballe dans du plastique les moteurs démontés, transformant ainsi quelque chose d’ordinaire en quelque chose de précieux, sophistiqué et fragile.

Comment avez-vous rencontré Cliff ?
Je l’ai connu quand je tournais mon long-métrage précédent, And There We Are, in The Middle [+lire aussi :
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fiche film
]
, dont les personnags étaient des adolescents, près du village où j’ai grandi. Un de ces jeunes pratiquait le paint-ball, et nous sommes allé deux fois là où il le faisait. À une de ces occasions, j’ai rencontré Cliff, car le terrain de paint-ball est en face de l’atelier où il travaillait alors avec d’autres collègues. À présent, Cliff est seul mais en 2014, il y avait plus de personnes qui travaillaient là-bas, toutes originaires du Nigeria. J’ai été fasciné par ce lieu isolé, caché : personne ne s'arrête là, et on le perçoit dans le documentaire, car on entend les bruits des voitures qui passent, non loin, et ce bruit est important dans le film, car il démontre qu’il y a d’autres vies en dehors de cet espace. Beaucoup de gens passent à côté sans découvrir cet univers. C’est un lieu particulier d’où on peut raconter une histoire de dimension globale, sur des rapports économiques qui se retrouvent mondialement : l’économie centrale européenne, très riche, est proche d’autres économies comme celles de la Roumanie, la Hongrie et la Bulgarie, qui dépendent davantage des produits d’occasion, de la réutilisation des pneus, des voitures ou de pièces de voitures.

L’atelier de démontage où se passe l’action était en face d'un lieu de loisirs où on utilise aussi des vieux pneus.
Ce lieu n’existe plus. Dans le film, on parle de lui et on l’entend, mais quand la caméra balaie l'espace, on ne le voit pas. Là-bas, j’ai tourné l'autre film dont je viens de parler, qu’un court-métrage en Super 16 mm, de sorte que j’ai pu observer ces évolutions dans le temps. Dans Movements of a Nearby Mountain, j'utilise des fragments de ce film antérieur, tourné sur pellicule, et aussi des sons que j’ai enregistrés à l’époque dans ce lieu. Ce faisant, j’introduis l’idée du recyclage de mon propre travail, mais aussi de la superposition des époques. Il y a quelques jours, ils parlaient, à la radio, des trous noir, qu'on ne peut photographier, alors qu'on peut photographier leurs contours ou ce qui les entoure : ils sont définis par certaines matières. Ça m’a paru intéressant, parce qu'il faut trouver des images et métaphores pour parler du fonctionnement de mon film. On peut difficilement décrire avec des mots le sujet du film, mais il y a tout un tas d'éléments autour qui le définissent et à travers eux, on peut voir le thème que j’aborde. Si on le compare avec le langage, mon film est plus proche de la poésie que de la prose, bien que ce ne soit pas un film artistique.

L’Afrique est la grande décharge de la technologie européenne : Cliff retourne dans son pays pour vendre de la ferraille.
Oui, on dépose avant tout là-bas des déchets électroniques, mais dans le cas des voitures, c’est plus complexe, car il y a une demande de mobilité, or les gens ne peuvent pas s’acheter des auto neuves, et il n’y a pas non plus de transports publics qui fonctionnent bien. En Autriche, beaucoup de gens vendent leur voiture parce que la réparer coûte trop cher, alors qu’au Nigeria, la demande est forte pour les vieilles voitures ou les pièces. Ainsi, Cliff amène ces pièces nécessaires sur son continent d’origine. Le film contient non seulement l’idée de réutiliser les choses ou de continuer à s’en servir sans les jeter, parce qu'au bout de la chaîne, quelqu’un les utilisera, mais il fait aussi allusion au fait que nos ressources ne sont pas perpétuelles, bien que nous croyons encore à des "promesses d’éternité", qui aujourd’hui s’exportent aussi sur le marché mondial, sous la tutelle du capitalisme.

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(Traduit de l'espagnol)

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