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FESTIVALS France

Claude-Éric Poiroux • Délégué général, Festival Premiers Plans

"Une dimension de plaisir qu’il ne faut surtout pas négliger"

par 

- Claude-Éric Poiroux parle du jeune cinéma européen à l’occasion du 31e Festival Premiers Plans d’Angers (du 25 janvier au 3 février)

Claude-Éric Poiroux • Délégué général, Festival Premiers Plans
(© Sandrine Jousseaume)

Fin connaisseur et ardent défenseur du cinéma européen, Claude-Éric Poiroux, délégué général et directeur artistique du Festival Premiers Plans d’Angers (31e édition du 25 janvier au 3 février) donne son point de vue sur l’évolution des jeunes auteurs du Vieux Continent, la distribution de leurs films et le rôle des festivals.

Cineuropa : Premiers Plans est centré sur la révélation des jeunes talents européens. Avec le recul du temps, quelles évolutions constatez-vous en matière de premiers longs métrages ?
Claude-Éric Poiroux :
Sans devenir fréquent, le cinéma de genre est beaucoup plus présent, ce qui n’était absolument pas le cas il y a une vingtaine d’années. On a vu aussi se libérer un certain nombre d’écritures, de formats, ce qui est clairement lié au numérique, à une certaine liberté de filmer et peut-être également à une certaine liberté de ton. Et on parle là de premiers films, donc d’étonnement, car ce qu’on voit arriver n’est pas prévisible : on ne le devine pas. Ensuite, sur les sujets, on constate que le cinéma des générations allant de 20 à 35 ans et qui débutent aujourd’hui, est plus en rapport avec la réalité que celui de leurs prédécesseurs qui était davantage axé sur le formalisme, même s’il y a évidemment des exceptions comme récemment Les Garçons sauvages [+lire aussi :
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fiche film
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. Il y a aussi actuellement une dimension personnelle et sociale importante : les personnages des premiers longs tournent souvent autour de l’enfance et de l’adolescence, avec des figures familiales : famille voulue ou rejetée, disloquée ou absente, violente, etc. En même temps, il y a une forme de transhumance : les personnages sont des gens moins fixés, ils sont toujours inscrits dans un environnement, mais celui-ci semble purement conjoncturel : c’est là, maintenant, mais cela pourrait être ailleurs.
Globalement, c’est assez frappant de voir au fil du temps ces jeunes cinéastes offrir une vision du monde contemporain et d’une Europe qui est maintenant très diverse avec beaucoup de pays représentés. Et à Angers, on voit aussi des personnalités émerger comme Fatih Akin, Arnaud Desplechin, Paolo Sorrentino ou encore Matteo Garrone dont nous avions programmé les deux premiers longs Terra di mezzo et Ospiti alors qu’il était encore très peu connu, même en Italie.

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Quid de la distribution de ces premiers longs métrages ?
Les films que nous présentons n’ont pas encore forcément de distributeur français. Quand j’ai lancé le festival, j’étais moi-même exploitant et distributeur et j’avais sorti les premiers films de Carax, Jarmusch, Assayas, donc je savais qu’il y avait une curiosité évidente des distributeurs pour les premiers longs. Mais j’avais aussi bien conscience du fait qu’un festival ne pouvait pas créer un marché de premiers films car c’est un segment trop fragile. La vocation d’un festival comme Angers, c’est de repérer des auteurs, de faire le tri parce que c’est quand même compliqué de voir tout ce qui se produit en Europe, mais aussi d’exposer ce qui a marqué l’année cinématographique en termes de découvertes car on peut parfois perdre un peu de vue un film après sa première mondiale. Aujourd’hui, les distributeurs font très bien leur travail et je pense qu’il n’y a pas beaucoup de films qui leur échappent, mais nous sommes là pour les aider et ils sont très présents à Angers, notamment lors des projections des films d’école de cinéma. Nous leur apportons également un public, la possibilité d’écouter les salles, car ils sont de plus en plus attentifs à la manière dont les films sont reçus. A Angers, les premiers longs métrages sont d’ailleurs projetés dans la plus grande salle, celle de 1300 places et nous faisons toujours le plein. Les réalisateurs sont là et il y a un véritable retour du public, ce qui est très utile aux professionnels. Évidemment, on ne tombe pas toujours sur un premier long qui annonce avec certitude une très grande carrière et certains films ont plus de difficulté que d’autres à trouver une place sur le marché, même en France où nous sommes privilégiés, mais cela ne doit pas diminuer l’attention qu’il faut absolument porter aux premières œuvres.

Avec 84 000 entrées enregistrées l’an dernier, Premiers Plans est un festival très populaire. Que vous inspire ce succès ?
Les festivals sont des alliés des exploitants. Aider les salles, c’est bien, mais lors d’un festival, il y a un enthousiasme, un parfum de fête, un état d’esprit qui sont très différents pour le spectateur par rapport à une séance normale en cours d’année. D’une certaine manière, c’est peut-être un peu comme revenir aux origines du cinéma, car le public d’un festival ne sait pas ce qu’il va découvrir, il y a élément de surprise comme pour un professionnel à Cannes qui assiste à une première mondiale, une dimension de plaisir qu’il ne faut surtout pas négliger. Projeter dans une ville comme Angers des premiers films européens inédits qui font venir un public très nombreux, en particulier les jeunes de 15 à 25 ans, c’est participer à la formation des spectateurs de demain et c’est très important pour l’ensemble de la profession de favoriser cette exposition. Car si le cinéma européen circule bien dans le monde, c’est très souvent car les festivals sont une sorte de tremplin avant les sorties en salles en stimulant l’appétence des spectateurs pour les œuvres européennes.

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