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Magnus von Horn • Réalisateur

"Aujourd'hui, les hommes vivent un conflit"

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- CANNES 2015 : Magnus von Horn, qui a présenté son premier film, Le Lendemain, à la Quinzaine des Réalisateurs, parle de ce tableau d'une vie de famille qui risque à tout moment de basculer

Magnus von Horn  • Réalisateur

Le Suédois Magnus von Horn s'est installé en Pologne au moment de ses études, et il a été adopté par son deuxième pays comme une des jeunes promesses du cinéma local. Avec Le Lendemain [+lire aussi :
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(The Here After), il est resté fidèle à ses racines, tout en montrant qu'il a aussi beaucoup appris de l'excellent cinéma qui se fait actuellement en Pologne. Son premier long-métrage, qui combine minimalisme formel et refoulement émotionnel, a été présenté à la Quinzaine des Réalisateurs du 68ème Festival de Cannes.

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Cineuropa : Votre film semble de nourrir d'agressivité, physique ou latente. Est-ce que cela reflète la notion que vous avez de la masculinité ? Ou de l'humanité ?
Magnus von Horn : C'est très lié à la masculinité, hélas, mais c'est inévitable. Attention, je me refère là à une généralité, je veux que ce soit clair. Cela dit, très souvent, les hommes sont bel et bien coupés de leurs émotions, et pour moi, c'est plus fréquent chez eux que chez les femmes. Bien sûr, on peut trouver ce détachement chez certaines femmes, mais c'est moins courant.

Après, dans mon film, l'agressivité ambiante n'est pas celle qu'on trouve dans les gangs, ou à l'armée. Ce n'est pas ce genre de tension entre pairs chargée de testostérone. C'est plus passif-agressif. Je pense que cette agressivité vient du fait que depuis des générations, le monde est gouverné par les hommes. Il a été créé par des hommes pour des hommes, qu'il s'agisse d'expansion territoriale ou commerciale ou autre. Pour conquérir comme ça, les hommes ont eu besoin d'ignorer leurs émotions et de prendre des décisions de raison, et c'est ainsi qu'ils ont abandonné leur moi profond, pour devenir l'ombre d'eux-mêmes.

Pensez-vous que ce détachement émotionnel que vous décrivez est un trait spécifiquement nord-européen ?
Je ne pense pas forcément que les hommes sont moins détachés ailleurs. Les différences sont plus dans la manière dont ils extériorisent. Ils le font ici en Pologne, par exemple. Si je ne vis plus en Suède, c'est parce que justement, je trouve qu'on y a tendance à "mettre un couvercle" sur les émotions. Je fais ça aussi, j'ai bien conscience que je suis très contenu sur le plan émotionnel, mais je fais des films, pour m'exprimer autrement.

Cela dit, je pense que ce détachement émotionnel n'est pas le propre de la Suède. Il s'exprime différemment ailleurs, c'est tout. C'est pour cela que les personnages de mon film restent très suédois, et que cela a déterminé la forme du film, mais on pourrait raconter la même histoire en la situant en Italie, ou en Iran, ou ailleurs. Cela ne changerait que l'aspect du film, selon la culture.

Essayez-vous de suggérer dans Le Lendemain que cette attitude masculine est en train de devenir problématique ?
Absolument, oui, car le monde est en train de prendre une direction nouvelle. Il s'est mis à regarder vers l'intérieur. Il est plus important de trouver une harmonie personnelle, une vie qui fait qu'on se sent bien dans sa peau. On est constamment amené à se demander si on est bien, si on est bien en couple. Pour tout cela, aujourd'hui, je pense que les hommes vivent un conflit. Ils se heurtent à quelque chose qu'ils ont du mal à affronter.

À mon avis, un bonne partie de l'agressivité masculine vient d'une vulnérabilité, et du fait qu'on attende à présent des hommes qu'ils dévoilent leurs émotions. Je pense que c'est le grand problème de nombre de mes personnages. Pour moi, c'est même une des raisons qui fait que John a tué, et que son père est incapable d'admettre qu'il y a un problème, et qu'il n'aime plus son fils.

Avez-vous aussi dans ce film un propos sur la rééducation de jeunes comme John ?
La société est certainement une des causes du problème que j'évoque dans mon film. John est bien le produit de l'influence de son père, de ses amis et de son école. Cette communauté a sa part de culpabilité. John n'est pas un individu isolé qui a tué quelqu'un comme ça : il co-existe avec d'autres individus au sein d'une communauté. Pour moi, c'est la raison pour laquelle il se fait traiter comme ça : c'est parce que cette communauté n'a pas les mains propres, mais l'admettre serait accepter le poids d'une faute dont elle ne veut pas.

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(Traduit de l'anglais)

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