email print share on Facebook share on Twitter share on LinkedIn share on reddit pin on Pinterest

Jacques Bidou • Producteur

Le Marché du documentaire en Europe

- Le marché du documentaire en Europe : acteurs, financements, analyse historique et perspectives futures

Quel est la situation du documentaire en Europe?
Le secteur du documentaire est très vivant en Europe mais la situation varie grandement d’un pays à l’autre. Par exemple, la Grande Bretagne a perdu sa position dominante alors que les pays du sud de l’Europe émergent très clairement. En Espagne, il y a une nouvelle vague du documentaire.

Comment le documentaire est-il financé en Europe ?
Le documentaire est principalement financé par les télévisions publiques et par les investissements publics. Le marché est encore dominé par les productions nationales. Les diffuseurs préfèrent les programmes de leurs pays. Les petites nations dont la langue est peu courante rencontrent des difficultés pour exporter leurs productions. Du fait de leur habitude des sous-titrages, elles sont en mesure d’importer une grande variété de films. Les nations plus grandes qui ont une tradition du doublage sont plutôt enclines à s’approvisionner chez elles. Il est très rare que la Grande Bretagne ou les Etats-Unis importent un film n’ayant pas été tourné en anglais.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

Le problème rencontrer par les sociétés est le fait que les subventions nationales ne peuvent excéder 50% du coût de la production. Cette situation diffère entre les grandes et les petites nations. En Europe de l’Ouest, ils existent des pays très dynamiques comme la Belgique ou la Finlande. Les sociétés de production de ces pays ont l’obligation de trouver de l’argent à l’étranger. Les grandes nations ont une politique proactive en faveur des documentaires : sans l’argent public il n’y aurait absolument aucun documentaire. Le problème est que l’investissement public est contraire aux obligations de coproduction. En effet, l’argent doit être dépensé dans le pays ayant octroyé la subvention. Cette règle a des conséquences fâcheuses. Par exemple, il existe beaucoup d’aides pour la postproduction mais il est impossible d’effectuer la postproduction d’une même œuvre dans plusieurs pays à la fois.

A l’aide des nouvelles technologies, les producteurs doivent trouvent une nouvelle façon de produire et de réduire les coûts en diminuant, par exemple, le temps de tournage.

Quel est le rôle d’Arte, la chaîne franco-allemande?
Dans ce contexte, Arte joue un rôle clé dans la structuration du secteur, pas en termes de public mais en termes d’impact. Il y a quinze ans, Arte avec d’autres grandes chaînes (Channel 4, France Télévisions, la chaîne publique finlandaise) a relancé le genre.

Comment le marché du documentaire a-t-il évolué depuis le lancement d’Arte?
Entre 1987 et 1997, le secteur du documentaire était un secteur d’auteurs : les documentaires étaient créés par les auteurs et produits par des producteurs indépendants avec le support financier des télévisions. Pendant longtemps, contrairement au secteur de la fiction, le documentaire n’était pas menacé par les productions indépendantes américaines. De nos jours, le marché s’est considérablement développé autours de thèmes comme l’aventure, la découverte et la vie sauvage. Ce genre est dominé par les productions anglaises et américaines : des productions de grandes qualités et standardisées. Ces productions qui sont en compétition avec des documentaires originaux et créatifs attirent les investisseurs privés.

Quelles sont les récentes évolutions du marché?
Nous assistons à la naissance d’un nouveau courant en Europe du Sud. Dans les pays du Nord, la tendance est à la production de magazines d’actualités et à de moins en moins de documentaires.

La situation évolue très rapidement. Il serait très difficile de donner un panorama complet du paysage documentaire et d’anticiper les prochaines tendances. Le marché sera probablement complètement restructuré avec la production et la distribution numériques.

La majorité de la production incombent à des sociétés indépendantes, souvent de très petites tailles (2 à 5 personnes). C’est un marché « patient » car il est très difficile de gagner de l’argent avec le documentaire. Le marché est notoirement dépendant des aides financières, fragile, mais il reste un secteur fort.

Il est important de construire un bon catalogue : cela constitue un substantiel retour sur investissement, particulièrement dans le pays d’origine.

Quelles difficultés rencontrera le secteur dans les prochaines années?
Tout d’abord, le genre devient excessivement formaté et rigide. Cela est dû aux changements progressifs des télévisions publiques dans les années quatre-vingt. Il existait des créneaux pour les documentaires qu’ils soient ou non sous forme de série (26mn pour une demi-heure, 52mn pour une heure). Ces créneaux étaient en place excepté pour les longs métrages documentaires. Aujourd’hui, ces créneaux pour les longs métrages documentaires ont tous disparus. Malgré tout, les documentaristes européens ont adoptés une stratégie efficace en créant différentes versions d’un même programme pour des publics et des diffuseurs différents.

Entre 1985 et 1995, l’auteur était le vrai pivot d’un documentaire. Il pouvait présenter son idée à un diffuseur et être financé. Avec l’ère des créneaux dans le milieu des années 90, les commissions éditoriales sont devenues les vrais décideurs. Les éditorialistes ont en charge les créneaux et savent ce qui est bon pour l’audience. Pour personnaliser sa cible, le diffuseur revient à des concepts très simples : les soixantenaires romantiques, les jeunes, les femmes célibataires,…

Les documentaristes subissent des pressions pour simplifier le genre et produire des magazines, des reportages qui sont moins chers et plus facilement accessible par le grand public. Les diffuseurs ont tendance à reproduire des recettes ayant fonctionné dans le passé.

Nous pouvons prendre comme exemple ce qui s’est produit en Grande-Bretagne ces 15 dernières années. Structurellement, nous observons un changement très important : réduction du nombre de créneaux horaires, réduction de l’échelle budgétaire. La ligne directrice des départements de l’information de ces chaînes télévisés a complètement changé. Le nombre de débouchés pour les documentaires indépendants (politique, monde) est réduit.

La réponse à une situation actuelle difficile en termes de coproduction avec la Grande-Bretagne sont les réseaux et les alliances. Il serait nécessaire de se rendre dans un pays avec un partenaire local. Il est très important d’effectuer des recherches et de comprendre la ligne éditoriale des diffuseurs.

Quels programmes sont intéressants pour les télévisions?
Le plus important lorsqu’on approche un diffuseur est d’avoir un point de vue original. Dans les pays de l’Est, il existe une longue tradition du documentaire et du cinéma. Il est primordial de comprendre que cette tradition ne sera pas détruite par les coproductions. Lorsqu’on recherchera une coproduction avec un pays de l’Ouest, il sera important de défendre ce point de vue.

Quel est le budget moyen d’un documentaire?
Le budget varie entre 75 000 et 1 000 000 d’euros pour un long-métrage documentaire. Cela dépend beaucoup du sujet et de sa destination (télévision ou cinéma). Il est possible de faire un bon film avec 100 000 euros. Si vous utilisez des archives, le coût augmente. Il est important pour un producteur de trouver le bon équilibre d’un projet dans des pays et des situations différentes.

A quel moment et avec quels documents un producteur peut-il approcher un diffuseur?
Le producteur doit de plus en plus financer lui-même le développement de son projet. Il doit donc chercher de l’argent en effectuant des recherches, en rédigeant des textes, en cherchant des associés,… C’est seulement quand le projet est suffisamment développé et solide qu’il est possible de rechercher des partenaires et des diffuseurs. La meilleure façon de défendre un projet est qu’il soit bien développé.

Il est également important d’avoir une société de distribution qui suivra le documentaire ou le film à l’étranger. Cela demanderait trop de temps à un producteur de suivre jusqu’au bout la vie de son projet. Il est nécessaire de bien choisir sa société de distribution et d’être en étroite relation avec elle.

(L'article continue plus bas - Inf. publicitaire)

Vous avez aimé cet article ? Abonnez-vous à notre newsletter et recevez plus d'articles comme celui-ci, directement dans votre boîte mail.

Lire aussi

Privacy Policy